ash and dust

"Boo!" Adaline se réveille en sursaut. En sueur et le coeur battant à tout rompre, elle se redresse sur ses coudes, les yeux grand ouverts et la respiration sifflante. Elle est dans le noir, seule la lumière de la pleine lune filtre à travers les volets à moitié ouverts. Encore perdue dans son cauchemar, elle soupire, passe une main dans ses cheveux et se met en position assise. Repoussant ses couvertures, elle attrape son téléphone sur sa table de chevet: quatre heures et demie du matin. Génial. Maintenant elle sait qu'elle n'arrivera pas à se rendormir. Alors elle décide de se lever, déjà un peu plus calme qu'à son réveil. Voilà longtemps qu'elle n'avait pas fait ce genre de rêves. Et à chaque fois, c'était le même: elle voyait cette main tendue, toute velue et d'une jolie couleur violette. Puis il y avait cette voix. Ces voix. Ces voix à la fois étrangères et plus que familières. Bien que son "voyage" dans cet autre monde date d'y il y a plus de dix ans, voilà qu'elle s'en souvient encore. Vaguement, comme à travers un rideau peu épais...Mais elle s'en rappelle, autant qu'elle peut. Parce qu'elle a beaucoup aimé ce monde-ci, autant qu'il l'a effrayée. Parce qu'il y avait Sully, aussi. Et Bob, qui au départ la détestait et a fini par l'apprécier, et la sauver.

Enfin calmée, elle se poste à côté de sa fenêtre et pose son front contre le bord de celle-ci avant de fermer les yeux. D'ici quelques heures, elle sera en bas, dans la cuisine. Elle entendra ses cousins descendre les escaliers, ainsi que sa tante. Et comme tous les matins, elle devra leur apporter café et nourriture, avant de prendre son propre petit déjeuner dans la cuisine parce qu'elle n'a pas l'autorisation d'avoir le moindre repas en leur compagnie. Et quand bien même elle pourrait, Adaline ne le voudrait pas. Parce qu'elle les déteste. Parce qu'elle veut être libre, mais que c'est impossible pour l'instant. N'étant pas majeure, Adaline n'a pas le droit de toucher l'argent de l'assurance de sa mère, ni même les économies qu'elle aurait pu mettre de côté pour sa fille, avant sa mort. Alors elle prend son mal en patience et elle attend. De toute façon, ce n'est pas comme si elle était en position favorable de partir et faire sa vie toute seule: et ses études? Et où vivrait-elle? Non, il vaut mieux qu'elle attende encore un peu. Après tout il ne reste que deux ans. Deux ans avant ses dix huit ans. Et puis elle sera libre.


Adaline rentre chez elle. Elle donne un léger coup de pied dans la porte pour que celle-ci se ferme et se traine jusqu'au salon, où elle finit par se laisser tomber sur son canapé. Boo est partie depuis bien longtemps, tellement qu'Adaline se demande si elle a vraiment existé. Et si elle avait tout inventé? Laissant tomber son sac sur le sol, elle pose ses deux mains sur son visage: fatiguée et usée, elle se demande comment elle en est arrivée là. Seule dans un petit appartement, sans boulot, sans famille. Sans rien. Quoi que, elle n'est pas réellement sans famille. Sa tant est encore et toujours après elle, cherchant inlassablement l'argent de feu sa soeur, la mère d'Adaline. Mais la jeune femme tient bon et ne cède ni au menaces, ni au chantage de sa tante. Elle n'est plus la petite fille fragile qu'elle était autrefois; aujourd'hui elle a sa propre vie, sa liberté. Sauf que malgré tout ça, malgré le fait qu'elle soit partie et qu'elle vive seule -enfin-, elle a du mal à trouver du boulot et enchaine les petits jobs sans intérêt, juste pour pouvoir garder le frigo plein et un toit au dessus de sa tête. Soudain, elle sent une présence juste au dessus d'elle et lentement, elle retire ses mains pour tomber sur le regard bleu azur de son chat. Celui ci vient de grimper sur son ventre, lui coupant légèrement le souffle. Adaline sourit et tend le bras pour le caresser. "Heureusement que toi, tu es là." Et, aussi vite qu'il est arrivé, son chat descend du canapé et elle lève les yeux au ciel, ne lui en tenant pas rigueur une seconde.

Ensuite, elle consent à se lever également, essayant de se motiver pour aller faire à manger. Et, alors qu'elle passe devant l'une des fenêtre, elle voit une sorte d'éclair de lumière. Les sourcils froncés, Adaline penche sa tête sur le côté et regarde, surprise, des étoiles filantes traverser le ciel. Alors elle sourit et machinalement, porte une main au pendentif en forme de coeur que lui avait offert sa mère, tout en pensant à ses voeux les plus chers.


"Laissez.Moi.Tranquille!", s'écrie Adaline en s'éloignant d'un pas rapide. Elle s'est habituée aux fantômes. Elle a eu du mal, mais elle s'y est faite! Sauf que voilà, ils finissent toujours par revenir et par lui chanter le même refrain et ce depuis qu'elle a mis les pieds dans le monde enchanté: Adaline serait la femme d'un certain Goblin et serait promise à un grand destin. Hors, elle ne sait pas si elle est prête à croire à tout ça. Déjà parce qu'elle a l'impression d'être une femme bien trop "basique" pour avoir un si grand destin prédestiné...Et puis surtout parce qu'elle ne connait aucun Goblin! Au départ, elle riait et prenait par à la farce des fantômes. Aujourd'hui, elle se méfie un peu et en vient presque à détester qu'on lui répète toujours la même chose. Comment croire quelque chose d'aussi énorme? Pourtant, une petite partie d'elle, sa partie "Boo" comme elle aime dire, a envie d'y croire. De crois qu'elle est prédestinée à faire de grandes choses et surtout, qu'elle a une âme soeur elle aussi, un grand amour quelque part. Il ne lui reste alors plus qu'à le trouver, n'est-ce pas?!